Je ne connaissais pas le réalisateur Terrence Malick. A mes premiers balbutiements pour évoquer mon regard sur son dernier film, j'ai été coupée dans mon élan par ces phrases. "On aime ou on aime pas", "Malick, on aime ou on déteste". Je vous resitue le contexte. Dans ma salle de gym, quelques minutes avant de commencer à se contorsionner, nous échangeons nos impressions de cinéphiles. Mais la musique a démarré, les souffles ont envahi la salle, l'esprit s'est concentré sur les muscles, avant que je puisse en savoir plus. Terrence Malick était déjà hors de portée.
Malgré les mauvaises conditions dans lesquelles je l'ai vu (petit écran, une ronfleuse à ma droite, une pop-corn girl derrière) ce film m'a, comment dire, bouleversée... non...éblouie...non plus...Le seul mot qui me vient est "extra-ordinaire". J'ai encore en moi les traces des images, des plans de lumière, des émotions des personnages, d'autant plus fortes qu'elles sont parfois contenues, esquissées. La construction très singulière, rythmée par des ruptures, est malgré tout fluide.
Étonnant. Peut être est ce le mot juste. L'univers de l'auteur m'a étonnée, transportée. L'enchevêtrement des mondes qui s'entrecroisent, une famille, le cosmos, l'au delà, est tissé comme une trame parfois complexe mais qui n'a de sens que dans ce maillage coloré, énigmatique. Une parabole, une allégorie de l'existence, du rapport à la vie, la mort, à la perte de l'autre, de soi. Le contraste entre la Nature puissante, brutale, radicale (représentée par le Père) et la Grâce (la mère) qui se suffit à elle même. est saisissant. La mère, douce, silencieuse dans l'ombre du père, est toujours là, veille au bien être de ses proches. Lui, exprime l'autorité, la règle, l'obéissance, parfois avec cruauté. Un père aimant aussi, souvent avec maladresse. Le rôle du père est si bien joué que Brad Pitt disparaît au profit de l'incarnation du Père, au sens freudien, oserais-je dire. La mère, interprétée par Jessica Chastain, est étonnante dans sa grâce, sa fragilité qui devient force. Elle contient la colère, l'autorité extrême du père.
Rupture. Les images splendides du cosmos nous rappellent que la nature nous échappe, le cycle de la vie se poursuit, au delà de l'existence humaine. Ces questions existentielles, qui nous traversent tous, sont révélées, comme une fresque toujours inachevée, mystérieuse. La teinte mystique, métaphysique, voir christique dont l'auteur enveloppe son oeuvre n'est pas monochrome. Elle m'a semblé refléter le puritanisme de cette famille, et à un autre niveau, appeler à une spiritualité, une foi dans la connaissance...Je pense qu'une deuxième plongée dans l'univers Malickien m'éclairerait sur cette coloration, qui m'a parue nébuleuse, particulièrement à la fin du film.
Le film peut émerveiller autant qu'il peut excéder vos âmes. Si vous envisagez de le voir, ne faites pas la même erreur que moi. Choisissez plutôt un grand écran et évitez de vous asseoir à côté de quelqu'un qui ronfle (hé oui il y en a qui viennent au ciné pour dormir) ou près d'amateurs de pop-corn.
N'hésitez pas, par un commentaire, à partager votre avis sur ce film.
LN